Doit des affaires

Société en formation, Société en participation et Société créée de fait

Introduction : L’absence de personnalité juridique, un trait commun source de confusion

Société en formation, Société en participation, et Société crée de fait sont régulièrement sources de confusion. Il est vrai que ces notions présentent des similitudes lesquelles ressortent notamment d’un trait caractéristique commun à savoir l’absence de personnalité morale. Le risque de méprise est d’autant plus fort que si ces notions sont bien exclusives les unes des autres, elles peuvent se succéder dans le temps. Une société en formation pouvant par exemple être requalifiée en société créée de fait.

L’absence de personnalité morale aura des conséquences évidentes. Ainsi, une société en formation étant dépourvue de personnalité morale, est nul le contrat conclu directement par elle et non pour son compte. A ce stade en effet la Société ne peut avoir de patrimoine propre et ne saurait agir en justice. Pour la Société en participation et les sociétés créées de fait qui suivent ici un régime identique, les effets sont tout aussi naturels et fixées de manière constante par la jurisprudence. En raison de l’absence de personnalité juridique, elles n’ont pas non plus la capacité d’ester en justice, ni de siège social, pas de dénomination sociale et évidemment donc sont dépourvues de patrimoine social. De sorte qu’elles ne peuvent souscrire le moindre engagement personnel, que ce soit en qualité de créancier ou de débiteur.

La reconnaissance de l’existence juridique est liée inévitablement à la réunion des conditions de constitution des sociétés telles qu’elles sont définies par l’article 1832 du code civil : « La société est instituée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent par un contrat d’affecter à une entreprise commune des biens ou leur industrie en vue de partager le bénéfice ou de profiter de l’économie qui pourra en résulter. […] Les associés s’engagent à contribuer aux pertes. ». Cette démarche peut intervenir soit à la demande de celui qui se prétend associé pour participer à un partage, soit le plus souvent, à la demande d’un tiers qui recherche l’engagement d’un associé. Mais l’existence d’une société même dépourvue de personnalité morale supposera toujours de rapporter la preuve des trois caractéristiques propres à ce contrat : La réalisation d’un apport d’une part. Le partage des bénéfices et des pertes entre les associés d’autre part. Et enfin un affectio societatis, lequel est définie par la jurisprudence comme la volonté, au moins implicite, de tous les associés de collaborer ensemble et sur un pied d’égalité à la poursuite de l’œuvre commune. Il apparait ici comme un élément crucial. En effet, à défaut d’affectio societatis, l’existence d’une société en participation n’est pas démontrée. Dans le même sens, la société créée de fait doit, et ce malgré ses particularités liées à l’absence de conscience de ses membres, répondre aux conditions de validité du contrat de société. Les associés devant notamment travailler sur un pied d’égalité. L’affectio societatis revêt alors des caractères particuliers dans cette forme sociale. L’affectio societatis se révèle, plus par l’exercice effectif d’une activité commune que par la volonté de collaboration des associés.

Distinguer ces sociétés apparait néanmoins essentiel dans la mesure où le régime juridique diffère dans les rapports entre associés, mais également dans les rapports entre les associés et les tiers. C’est pourquoi il apparait nécessaire de définir ces notions. La société en formation recouvre la période où la société n’est pas encore immatriculée et où, à ce titre, elle n’a pas encore acquis la personnalité morale, même si elle a déjà une certaine consistance juridique. La Société en participation quant à elle est une « société créée en connaissance de cause ; elle résulte d’un choix délibéré des partenaires en présence qui, après avoir pesé le pour et le contre, décident de se réunir au sein d’une société non immatriculée ». Enfin, La société créée de fait, notion d’origine jurisprudentielle se définie manière unanime comme la situation par laquelle « deux ou plusieurs personnes se sont comportées en fait comme des associés, sans avoir exprimé la volonté de former une société».

De ces précisions il résulte que le critère de distinction est psychologique. L’intention des membres devient ici le cœur du sujet. Ainsi le praticien sera amené à s’interroger sur la volonté explicite ou non des associés à travailler ensemble pour un objectif commun. Il devra prendre en considération la conscience ou l’ignorance de ces derniers dans le développement d’une activité. Il devra encore apprécier la détermination des participants à immatriculer ou non la Société. L’analyse de l’intention initiale des associés deviendra essentielle afin connaitre le régime utile.

Plan de l’étude

I. Un critère de distinction : L’élément psychologique
A. La volonté de participer à une œuvre commune
1. La Société en formation : l’intention de constituer une société
2. Sociétés en participation et Sociétés créées de fait : la conscience ou l’ignorance de collaborer à œuvre commune
B. La volonté d’immatriculer la Société
1. La distinction entre la Société en formation et la Société en participation : L’absence volontaire d’immatriculation
2. Un critère néanmoins insuffisant pour écarter définitivement la notion de Société créée de fait
II. L’intérêt de la distinction
A. Les rapports entre associés
B. Les rapports avec les tiers