Droit social

Retour sur l’indemnisation de la faute inexcusable de l’employeur

La rente versée à l’occasion d’une reconnaissance d’incapacité permanente suite à un accident du travail ou à une maladie professionnelle ne répare plus le déficit fonctionnel permanent.

Par deux arrêts du 20 janvier 2023, la Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence en matière d’indemnisation des salariés ou de leurs ayants-droits suite à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, en cas de reconnaissance d’une faute inexcusable de l’employeur.


Pour rappel, lorsqu’un salarié est victime d’une maladie professionnelle ou d’un accident du travail, il est amené à percevoir, dans un premier temps, des indemnités journalières pendant la durée de l’arrêt de travail.


En cas de reconnaissance d’une incapacité permanente ou de décès du salarié, la victime ou ses ayants-droits peuvent se voir attribuer une compensation financière forfaitaire et automatique sous la forme d’une rente ou d’un capital.

La rente ou le capital versé ont vocation à réparer trois types de préjudices :

La perte de gain professionnel

L’incapacité professionnelle

Le déficit fonctionnel permanent

Cette indemnisation forfaitaire entraîne alors l’impossibilité pour les requérants d’obtenir une réparation de l’intégralité de leurs préjudices devant la juridiction intéressée.

Toutefois, la Cour de cassation, par un arrêt du 28 février 2002, admettait qu’était reconnue une faute inexcusable « lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le
salarié, et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver
».
Cour de cassation, chambre sociale, 28 février 2002, n°00-11.793


La reconnaissance d’une telle faute inexcusable permet alors au salarié ou à ses ayants-droits de solliciter une majoration de la rente ou du capital, ainsi qu’une réparation de l’intégralité des préjudices en résultant, sauf à ce que ce préjudice soit préalablement pris en charge par l’indemnisation forfaitaire.


Le salarié pouvait alors solliciter, notamment, la réparation de son préjudice esthétique temporaire et permanent, des frais d’aménagement de son logement ou encore des frais d’assistance d’une tierce personne avant la consolidation de son état de santé.


Par les arrêts du 20 janvier 2023, la Haute juridiction admet désormais que la rente ou le capital n’indemnise plus le déficit fonctionnel permanent, de sorte qu’en cas de reconnaissance d’une faute inexcusable, les requérants peuvent en demander la réparation.


Par définition, le déficit fonctionnel permanent correspond aux souffrances éprouvées par la victime ou ses ayants-droits suite à l’incident, dans le cadre de leur vie quotidienne. Cette décision s’inscrit alors dans un rapprochement de la jurisprudence du Conseil d’Etat qui admet de façon constante que la rente d’accident du travail doit être regardée comme ayant pour objet exclusif de réparer les préjudices subis par la victime dans sa vie professionnelle en conséquence de l’accident.

Ainsi, les requérants disposent désormais d’un angle d’indemnisation plus large dans l’hypothèse d’une reconnaissance de faute inexcusable de l’employeur.

Nous nous tenons à votre disposition si vous rencontrez des difficultés quant à la mise en place ou l’application de ces mesures.


Cour de cassation, assemblée plénière, 20 janvier 2023, n°21-23.947
Cour de cassation, assemblée plénière, 20 janvier 2023, n°20-23.673